L’entrepreneuriat des jeunes en Afrique se révèle être un levier puissant pour relever les défis alimentaires qui persistent sur le continent. Les jeunes entrepreneurs africains sont à l’avant-garde de l’innovation. Ils conçoivent et mettent en place des solutions durables pour développer une sécurité alimentaire accrue. Le 16 juin 2023 à l’occasion de la 10e édition des Journées Nationales des Diasporas et de l’Afrique (JNDA), le Fonds a réuni à Bordeaux des acteurs et spécialistes des systèmes agricoles et alimentaires africains pour explorer les différents aspects de la dynamique entrepreneuriale et mettre en lumière les opportunités les obstacles, les initiatives existantes et les exemples de succès qui émergent.
Animée par Jacques-Olivier Pesme, Vice-Président du Fonds Pierre Castel - Agir avec l’Afrique, cette rencontre a pris la forme d’une table ronde autour de ‘’l’entrepreneuriat agricole, un levier pour répondre aux défis alimentaires en Afrique’’.
‘’Le potentiel agroalimentaire africain est immense. Il bataille des chiffres, mais globalement on pense qu’il y a 500 millions d’hectares de terre arable sur le continent. Un pays comme la République Démocratique du Congo aurait 80 millions d’hectares de terre arable disponibles. Et en termes de démographie, nous attendons sur les 40 prochaines années, 600 millions de jeunes africains avec 15 millions par an qui arrivent sur le marché du travail ; et en face, il n’y a pas grand-chose. L’agriculture est un des leviers de la transformation africaine.’’ - Kako Nubukpo, Commissaire chargé du Département de l’Agriculture, des Ressources en Eau et de l’Environnement (DAREN) de la Commission de l’UEMOA.
Les discussions et partages d’expérience de la table ronde ont été précédés par un discours introductif de Kako Nubukpo. Son intervention a permis de mettre en évidence le rôle de l’entrepreneuriat agricole face aux défis actuels et futurs des systèmes alimentaires, de présenter le contexte agricole africain et d’en énumérer les principaux enjeux impactant sa productivité. Ces enjeux se résument en 4 points clés :
1. Le réchauffement climatique qui a fait perdre 20% de la productivité agricole africaine sur les 40 dernières années. Pour redresser la barre et éviter à nouveau les pertes, il faut : une meilleure maîtrise de l’eau, un meilleur suivi des itinéraires techniques et beaucoup plus de recherches variétales.
2. Le renforcement des arrangements institutionnels. Selon Kako Nubukpo, la question de la structuration des organisations paysannes est cruciale. A cet effet, l’économiste a cité l’exemple de l’UEMOA qui déploie une stratégie priorisant le développement de 5 filières : celles végétales avec la culture du riz, de maïs et de coton, la filière bétail-viande et la filière avicole. Pour chacune de ces filières, les producteurs sont identifiés et structurés en faîtières tant sur le plan régional que sur le plan supranational. En plus du besoin de structuration, l’on dénote des enjeux de stockage, d’infrastructures adéquates pour écouler les productions, faciliter la transformation et une meilleure conservation des denrées périssables.
3. La cohérence des politiques publiques (commerciale, change, budgétaire…)
4. L’accompagnement des entrepreneurs agricoles :
Kako Nubukpo lors de son discours d'introduction de la table ronde - JNDA 2023
6 panélistes ont pris part à cette séquence pour partager leurs expériences autour de la thématique traitée. La richesse de ce moment a résidé dans la pluralité des regards de ces intervenants exerçant dans différents secteurs : agro-industrie, enseignement supérieur, organismes publics et associatifs, agri-entrepreneuriat.
Karim Ait Talb
Directeur général délégué chez Advens-Geocoton
Simon Baliteau
Responsable du programme AGRITER, Agrisud International
Florence Bassono
Gérante de Faso Attiéké
Bintou Kaltoume Aboubakar
Gérante de CAFADEC SARL
Siaka Koné
Directeur de l’Ecole Supérieure d'Agronomie (ESA) de l’INP-HB
Rivo Rakotondrasanjy
Président de la CCI d'Antananarivo et du Patronat Malagasy FIVMPAMA
Tous sont unanimes : l’entrepreneuriat agricole est un levier stratégique pour répondre aux défis alimentaires en Afrique. Cependant, face aux défis auxquels ils font face aujourd’hui, comment les accompagner ?
‘’La question de l’attractivité du secteur agricole est une question historique et mondiale. Il faut créer un environnement propice au développement d’entreprises s’engageant à répondre aux défis de ce secteur sur des objectifs que les générations précédentes n’ont pas pu porter.’’- Siaka Koné, Directeur de l’ESA de l’INP-HB.
Pour Simon Baliteau, Responsable du programme AGRITER chez Agrisud International, les métiers agricoles sont de moins en moins attractifs pour les jeunes dans les zones rurales. Cela est dû à la pénibilité du travail, une rémunération insuffisante et variable, des niveaux de risques élevés liés aux variations climatiques, mais aussi et surtout à l’accès difficile aux moyens de production (accès à du crédit, au foncier…) et à la ‘’dépréciation sociale liée aux métiers agricoles’’.
A titre d’illustration et de témoignage, Bintou Kaltoume Aboubakar, Gérante de CAFADEC SARL a partagé ses difficultés entrepreneuriales au Cameroun. Trois défis majeurs en sont ressortis : l’accès au titre foncier, l’accès au financement, et le recrutement de la main d’œuvre. Au Cameroun, les femmes n’ont pas de droits fonciers formels. Elles ne peuvent donc posséder de terres, ce qui représente un frein pour l’accès au financement. L’attractivité de ce secteur est l’une des causes de la difficulté de recrutement. Selon son expérience, les jeunes portent beaucoup plus d’intérêt aux grandes entreprises car ils sont à la recherche d’une rémunération plus conséquente, d’une reconnaissance sociale et d’une situation plus aisée.
Ces enjeux influent sur la productivité, la rentabilité et entraînent une concurrence déloyale sur le marché mondial.
‘’Sur la zone Afrique de l’Ouest - Afrique Centrale, vous avez 25 millions de personnes qui vivent de la culture du coton. Dans certains pays, le coton représente 50% des zones de production céréalière. Pour autant, le coton africain pèse pour 4% de la production mondiale et les américains qui sont les premiers exportateurs, c’est seulement 25 000 exploitations familiales qui produisent beaucoup plus.’’- Karim Ait Talb, Directeur général délégué chez Advens, Geocoton
Face à ces enjeux d’attractivité et de productivité des solutions sont énoncées. Selon Simon Baliteau, il faut :
A PROPOS
JOURNEES NATIONALES DES DIASPORAS ET DE L’AFRIQUE
Depuis le 25 mai 2013, ces journées s’imposent comme le « Rendez-vous annuel » des acteurs de la relation entre l’Afrique, sa diaspora et le monde. La 10e édition a lieu les 15, 16 et 17 juin à Bordeaux. A chaque édition, cet évènement se veut être une grande rencontre économique avec des échanges de haut niveau, des rencontres privilégiées, des ateliers et des séquences culturelles.
Participer aux JNDA permet au Fonds de :